mardi 27 mai 2014

Une exposition sur le sacre des Rois de France à Reims !

Près de deux siècles après le dernier sacre d'un roi de France à Reims - Charles X, en mai 1825 -, le Centre des Monuments Nationaux, en partenariat avec le Château de Versailles, organise une grande exposition sur les sacres des Bourbons, « de Louis XIII à Charles X » au Palais du Tau !




La page de l'exposition promet la découverte d’œuvres et de documents inédits venus des collections de la BNF, du Mobilier National ou du château de Versailles. 70 œuvres doivent être exposées au public pour évoquer le souvenir des sacres, « fondement essentiel de la monarchie absolue. »

Quels enjeux pour le sacre de Charles X ?
L'événement a presque dépassé en notoriété son principal acteur. Le sacre de Charles X, en mai 1825, est peut-être le mieux connu des historiens, tant les sources contemporaines sont nombreuses dans toute la France. C'est aussi le plus récent et il bénéficie encore de nombreuses reliques, exposées en permanence à Reims - ce qui lui confère une visibilité non négligeable. En outre, il est régulièrement cité par des journalistes, vulgarisateurs (de bonne foi ou non) et quelques historiens pour caractériser l'entreprise voulue de retour à l'Ancien Régime de Charles X.

Abondamment commenté en France en 1825, source de créations artistiques de tous ordres - pour la plupart commandées -, le sacre de Charles X a été peu étudié. Jean-Paul Garnier s'est livré à une étude de son impact dans l'opinion publique (1927) et Landric Raillat, sous l'impulsion d'Alain Corbin, s'est livré à l'écriture d'une imposante monographie (Le sacre de la dernière chance, 1991), assez enthousiasmante bien qu'elle précise d'emblée une faiblesse : toutes les sources n'ont pas été dépouillées. Il faut reconnaître pourtant à l'historien les grands mérites de son ouvrage, notamment celui qui consisterait à ne pas le condamner d'avance à une entreprise réactionnaire. Raillat montre d'ailleurs bien dans sa première partie les innombrables accommodements avec la tradition, autant structurels (une presse hostile et l'obligation de s'inscrire dans une réalité politique) que conjoncturels (les funérailles de Louis XVIII avaient déjà coûtées une fortune).

L'un des nouveaux enjeux d'une évocation du sacre de Charles X est de l'évoquer au prisme des avancées historiques sur la notabilité du premier XIXe siècle qui offrent le panorama d'une France encore largement dominée par une noblesse qui tente de pérenniser un Ancien Régime revisité, drapée des ors traditionnels du pouvoir mais préoccupée à s'adapter au monde moderne, né en partie de la Révolution. Ainsi le sacre, sous des dehors fastueux et anachroniques (quoiqu'ils furent revisités pour l'occasion, notamment dans la liturgie) est aussi l'occasion pour le souverain, en représentation, de montrer l'image d'une France apaisée (on trouve des maréchaux d'empires, des artistes, des savants), pragmatique (le toucher des écrouelles qui manque de disparaître, la populaire visite du bazar) et moderne (le serment sur la charte). De quoi se pencher sérieusement sur l'idée, trop facilement admise, d'une cérémonie désuète et réactionnaire.

Qu'attendre de l'exposition ?
Un renouveau de l'image du sacre de Charles X est a espérer mais il y a fort à parier qu'il n'aura pas lieu, faute de travaux récents. Plus trivialement, une telle exposition doit être l'occasion d'admirer des collections rares ou trop peu présentées - espérons par exemple que la voiture du sacre de Charles X sera là, remisée en temps normal dans le musée (fantôme ?) des carrosses de Versailles. Il serait aussi intéressant de montrer les nombreux préparatifs du sacre de Louis XVIII - réutilisés en partie par la suite.

Et pour ne pas bouder notre plaisir de cette occasion incontournable de retourner dans la ville des sacres, il faut rappeler que le terme de majesté n'a jamais trouvé autant de sens que dans ces cérémonies grandioses, symboles d'une puissance émotionnelle réelle, dénuée de toute nostalgique surannée. Marc Bloch rappelait encore leur dimension historique majeure en 1940 : « Il est deux catégories de français qui ne comprendront jamais l'histoire de France : ceux qui refusent de vibrer au souvenir du sacre de Reims ; ceux qui lisent sans émotion le récit de la fête de la Fédération. »

Le Palais du Tau en 2010. (coll. personnelle)


   
Où et quand ?
Du 28 mai au 2 novembre 2014.
Tous les jours (sauf le lundi) de 9h30 à 18h30.
Tarifs variables.

Palais du Tau
2, place du cardinal Luçon
51100  REIMS

Bibliographie / Internet
. Landric Raillat, Charles X ou le sacre de la dernière chance, Paris, Olivier Orban, 1991.
. Site officiel de l'exposition Sacres royaux.

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